Génération 1970, tome 2 : Swinging Seventies by Jean-Pierre Charland

Génération 1970, tome 2 : Swinging Seventies by Jean-Pierre Charland

Auteur:Jean-Pierre Charland [Charland, Jean-Pierre]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Éditions Hurtubise
Publié: 2021-11-24T01:48:23+00:00


Quand un intellectuel – Jacques s’attribuait de plus en plus cette étiquette – désirait apprendre une nouvelle langue, le mieux était de se trouver de gros livres portant sur un sujet passionnant, publiés dans celle-ci. Pour lui, ces sujets étaient nombreux, mais la sexualité figurait en tête de liste. À cause de son âge et de ses appétits frustrés. Ces lectures ne seraient peut-être pas utiles pour passer l’examen d’anglais requis pour l’admission à la maîtrise, mais sa culture générale s’enrichissait.

Ces dernières semaines, son intérêt se portait sur les travaux de William. H. Masters et Virginia E. Johnson. Les fameux Masters & Johnson, dont chacune des publications se vendait à des millions d’exemplaires partout dans le monde. Dès 1966, un ouvrage paraissait sur les réactions sexuelles des êtres humains. Ils avaient pu décomposer le coït en quatre étapes: une phase d’excitation, un plateau, l’orgasme et la «résolution».

Le livre suivant de Masters et Johnson avait porté sur les difficultés sexuelles, et le plus récent sur le plaisir comme lien entre les amoureux. Il les avait lus aussi. Et en plus des informations proprement dites sur le sujet éminemment sérieux qu’était la sexualité, la méthode de ces chercheurs l’intéressait. Tout bonnement, ils avaient posé des senseurs ici et là sur les corps de centaines d’hommes et de femmes, et avaient filmé les copulations en gros plan. Les assistants de recherche dans ce domaine s’amusaient plus que ceux en histoire. De là les conclusions incontestables – et décevantes, quand on était un homme – sur les orgasmes: les femmes les accumulaient l’un à la suite de l’autre, une performance impossible à atteindre pour leurs compagnons.

Ces films dépassaient certainement en intérêt ceux présentés au Midi-Minuit et au Pigalle, les deux cinémas «spécialisés» de la Basse-Ville. Peut-être les verrait-on en salle, un de ces jours.

Ce samedi après-midi, Jacques s’intéressa plutôt à un sous-produit de ces recherches: les mémoires de Valerie Scott, une thérapeute sexuelle embauchée par Masters et Johnson afin de traiter les dysfonctions sexuelles de neuf clients. Elle agissait comme «épouse de remplacement». C’est-à-dire qu’elle jouait le rôle d’épouse lors de séances, pour les guider à petits pas vers une sexualité épanouie.

«Je me demande bien si elle m’aiderait à effacer les effets néfastes que mes parents ont eus sur moi», se demanda-t-il. Quand ce sujet venait le hanter, surtout la nuit, il se rassurait toujours de la même façon: quand il serait professionnellement installé, il oublierait le chemin du Petit-Montréal et toutes les conséquences de ses dix-huit années passées là-bas.



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